Police

Hugo Boris

Grasset

  • Conseillé par
    11 novembre 2016

    Trois policiers et une mission qui sort de l’ordinaire en fin de journée. Conduire au centre de rétention de Roissy un homme pour une expulsion du territoire. Dans la voiture, Virginie qui a repris du service après son congé maternité outrepasse ses fonctions et ouvre l’enveloppe contenant le dossier de l'homme. Elle lit que dans son pays le Tadjikistan, il a été torturé. Il est calme et ne dit rien assis à l’arrière. Ses deux autres collègues policiers Erik et Aristide sont plongés dans leurs pensées.

    "Il n’y a pas marqué assistante sociale, ni avocate, ni infirmière. Il y a marqué police" sur son uniforme et pourtant Virginie doute de ce qu’ils font. A la rigueur mais la suite, ces trois policiers qui sont prêts à laisser partir cet homme : je n’y ai pas cru un seul instant. Certes, Hugo Boris dépeint parfaitement le quotidien de ces policiers.
    La fatigue, le travail peu gratifiant qui colle à la peau où "l’on se prend de plein fouet, sans filtre, tous les problèmes dans lesquels se débat ce pauvre monde". En plus, on a l'impression d'être dans cette voiture de police, de ressentir l'atmosphère. Pour moi, ce sont les seuls points positifs de ce livre. Et je trouve dommage que l'auteur n'ait pas développé le personnage du clandestin.


  • Conseillé par
    18 septembre 2016

    Bleus à l'âme

    C’est déjà son sixième texte et, une fois encore, Hugo Boris nous surprend. Après son très beau « Trois grands fauves » dans lequel il mettait en scène avec talent Victor Hugo, Danton et Churchill, ou le fort remarqué « Je n’ai pas dansé depuis longtemps », place aujourd’hui à un huis-clos étouffant avec Virginie, Erik et Aristide. Ce trio de gardiens de la paix se retrouve un soir à devoir accomplir une mission qui fera voler en éclats quelques-unes de leurs certitudes et les poussera à s’interroger sur le sens de leur travail.

    Le quotidien, fait d’habitudes autant que de dérapages personnels, chacun d’eux le maîtrise. Mais lorsque les trois flics se retrouvent à convoyer un homme vers Roissy, tout vacille.

    Lire la suite de la critique sur le site o n l a l u


  • Conseillé par
    5 septembre 2016

    émotion, expulsion

    Quel roman ! Quelle ambiance, quelles émotions ! (oui, j’aime bien les points d’exclamation, et si je pouvais, je les ferai même à l’envers, na !)

    Un roman court, une action qui se déroule sur peu d’heures, mais des souvenirs cuisants émaillent la soirée. Des images d’un quotidien de policier qui en voit des vertes et des pas mures : la société française de fond en comble.

    Les trois personnages principaux sont attachants, plus vrais que nature.

    Une langue qui va à l’essentiel, mais qui sait suggérer un arrière-plan tout aussi important de banlieues dortoirs et de chaînes de magasins uniformes.

    Une réalité noire qui m’a émue.

    L’image que je retiendrai :

    Celle du Tadjik reconduit à la frontière qui, ne comprenant pas la langue, réagi à contre-temps.

    http://alexmotamots.fr/?p=2198


  • Conseillé par
    30 août 2016

    Admirablement mené

    Pas très facile à résumer ce livre si l'on veut ménager le suspense, il me faut être succinct et susciter l'envie de le lire, car il le mérite. C'est ma première lecture d'Hugo Boris et je tombe sur ce court roman au rythme rapide, haché, et bien qu'il ne s'y passe quasiment rien en terme d'action sur les 100/120 premières pages, il est passionnant. La tension monte pour le lecteur mais aussi entre les trois flics dans la voiture, le clandestin tadjik restant étonnamment silencieux et impassible. Le texte est nerveux, vif, phrases courtes et/ou très ponctuées, vocabulaire simple, langage oral -pas mal de dialogues mais point trop.

    Il faut dire que la tension est plus que palpable entre Virginie et Aristide : ils ont couché ensemble, elle attend un enfant qu'elle ne veut pas garder, son mari ne sait rien ; lui, Aristide, un type un peu lourd, macho, réalise qu'il a laissé peut-être passer une occasion qui ne se représentera pas forcément : Virginie est une jolie femme, volontaire, courageuse, opiniâtre, une bonne policière, pas tout à fait libre mais presque.

    Ces trois flics sont fatigués. Fatigués de ce qu'on leur demande de faire, de ne plus pouvoir couper entre vie privée et vie professionnelle. Fatigués des journées à rallonge. Flic, c'est un boulot qui colle à la peau. "En voiture, avant de démarrer, tant que l'anti-car-jacking ne s'est pas déclenché, il reste sur ses gardes. Même en jean, il est encore en tenue. Même au volant, avec les enfants qui chahutent à l'arrière, il est encore en patrouille. Dans les lieux publics, Pascale lui demande d'arrêter de dévisager les gens. C'est plus fort que lui, au point qu'on lui demande parfois : "On se connaît ?". Dans la rue, il insiste pour qu'elle tienne son sac côté immeuble. Dans les transports, pour qu'elle ne sorte pas son portable. Ils ont pour principe de ne pas se quitter fâchés. Parce qu'un jour, ce n'est peut-être pas lui qui l'appellera. C'est qu'il a épousé son travail d'abord, comme tous les flics du monde." (p.106)

    Cette nuit sera celle des grands questionnements, des sentiments contradictoires qui les animent. Comment garder sa dignité en obéissant aveuglément aux ordres ? Quid de sa conscience ? De l'estime de soi ? Jusqu'où obéir ? Comment rester soi-même, ne pas avoir honte de ses actes ? Comment exister tout simplement ? Asomidin Tohirov, le clandestin sera le déclencheur involontaire de ce déferlement de questions. C'est lui, bien involontairement derechef, qui mettra les nerfs des trois flics à vif.

    Admirablement mené, ce roman. Le style colle aux heurts et aux prises de bec des trois protagonistes, à leurs doutes, leurs questionnements. Il se lit rapidement puisqu'on ne le lâche pas une fois ouvert. Ce n'est pas un polar même si les personnages principaux sont des flics, c'est un roman très fort sur la difficile question qui conclut la quatrième de couverture : "Comment être soi, chaque jour, à chaque instant, dans le monde tel qu'il va ?"